Activer la vie du sol


L'ACTIVITE BIOLOGIQUE DU SOL

On trouve dans les sols, une grande variété d’organismes vivants : des bactéries, des champignons, des algues, des nématodes, les parties souterraines des cultures et des herbes, ainsi qu’une faune très variée allant des protozoaires aux mammifères. L’ensemble de ces organismes font partie intégrante du système sol et participe par leur activité à la formation et à l’évolution des sols. La communauté microbienne constituée de 100 000 à un million d’espèces différentes par gramme de sol, est particulièrement complexe à étudier.
Ainsi, les sols à texture fine (argileuse ou limoneuse) et à pH alcalins (pH>7) avec des teneurs importantes en carbone organique sont plus favorables à la vie microbienne que les sols sableux acides. On observe par exemple des quantités d’ADN élevées dans les sols argileux de Lorraine, alors qu’elles sont faibles dans les sols sableux acides des Landes de Gascogne.


L’influence du mode d’occupation des sols peut également être observée et plus particulièrement l’impact de certains systèmes de culture. Les sols de vigne semblent renfermer une faible biomasse microbienne, tout comme les sols de grande culture en comparaison des sols sous couvert forestier ou sous prairie. Les monocultures montrent également des niveaux de biomasse plus faibles par rapport aux rotations culturales ou aux alternances entre les prairies et les grandes cultures.
 

Un bel exemple de symbiose

Toutes les plantes qui poussent dans les sols développent une relation du type symbiotique avec les organismes qui peuplent la zone racinaire. Les milliards de bactéries (1 à 2 milliards dans l’équivalent d’un dé à coudre), les champignons, (plusieurs centaines de milliers), algues, cyanobactéries, protozoaires par milliers et autres organismes qui croissent dans la rhizosphère sont beaucoup plus nombreux que ceux vivant dans la majeure partie restante du sol. Aujourd’hui, les extractions d’ADN microbien permettent, à partir de prélèvements au sol, de quantifier la présence et l’intensité de la vie du sol et de mesurer l’effet de la nature du sol (texture et structure) et des pratiques culturales à moyen termes.

Les exsudats racinaires

Ceux-ci correspondent à la sécrétion, par la racine, de composés organiques qui diffusent dans le sol. Les plantes nourrissent les organismes avec des cellules épidermiques mortes exfoliées sous forme de composés exsudés par les racines elles-mêmes. La plante peut transférer jusqu'à 25 % de son énergie stockée dans les feuilles (95 % de sucres, polysaccharides ou hydrates de carbone), des acides aminés et autres composés comme des acides organiques, des enzymes, des phénols, des stérols ou encore des vitamines, vers la zone racinaire pour nourrir ces micro-organismes et cela à des fins très utiles.

La libération de composés de carbone (C) suintant le long de toute la surface des racines démontre à bien des égards une belle relation symbiotique. Il a été montré qu’il existe un étroit couplage entre l’activité microbienne rhizosphérique, les exsudats racinaires et la photosynthèse.

La plante nourrit les bactéries, champignons, algues et autres espèces microbiennes dans la rhizosphère, qui à leur tour en échange, sécrètent des enzymes, des acides organiques, des antibiotiques, des régulateurs de croissance, des hormones et d'autres substances qui sont absorbés par les racines et transportés vers les feuilles.

Les termes de l’échange « donnant-donnant »

Les micro-organismes constitutifs de la rhizosphère sont impliqués dans divers mécanismes connus comme :
- la solubilisation d’éléments nutritifs facilitant leur absorption par la plante ;
- la synthèse de substances de croissance (hormones) ;
- le bio-contrôle (protection contre les pathogènes ou, à l’inverse, attaque des racines) ;
- la fixation d’azote atmosphérique par des bactéries spécifiques chez les légumineuses (mode de fixation symbiotique) ou la fixation libre par d’autres bactéries, comme le genre Azotobacter.

Solubilisation d’éléments nutritifs

L’aide apportée par les micro-organismes s’avère particulièrement précieuse lorsque les éléments nutritifs sont plus difficiles à absorber parce que « rétrogradés » au niveau du sol. C‘est le cas du phosphore dont seulement 10 % de la quantité totale contenue dans le sol est sous forme d’ions assimilables (HPO42- et H2PO4-) par les cultures.
Les 90% restant sont des ions piégés liés étroitement à d’autres cations comme le calcium, le fer ou l’aluminium. Malgré « l’arsenal » secrété par les racines pour désorber le phosphore du milieu via l’exsudation d’acides organiques, l’émission d’ions H+, mais aussi l’émission d’enzymes, appelées phosphatases (afin d’hydrolyser le phosphore d’origine organique), les plantes vont faire appel aux bactéries Pseudomonas du sol. Celles-ci ont alors une importance cruciale.

Les dicotylédones utilisent ainsi ce processus pour augmenter leur absorption de fer, élément naturellement peu soluble et difficilement assimilable.
Les graminées utilisent un autre procédé. Leurs racines sont capables de libérer de très grandes quantités d’acides aminés particuliers, appelés phytosidérophores ayant une grande affinité avec les ions ferriques Fe3+. Ils rendent aussi plus assimilables d’autres éléments comme le manganèse, le zinc ou le cuivre. Mais ce n’est pas tout car il s’avère que des bactéries (Pseudomonas Turgensis) sont capables d’émettre ce genre de molécule transportant le fer appelée sidérophore.
Un autre exemple est celui de la dynamique du soufre qui implique plus directement certains organismes du sol. Cet élément peut être rapidement immobilisé dans le sol sous forme organique. Cette immobilisation dépend du type de plante et du type de micro-organismes présents dans la rhizosphère. Les crucifères par exemple (colza) émettent des exsudats racinaires qui stimulent la synthèse d’enzymes d’origine microbienne impliquées dans la solubilisation du soufre. Ainsi, l’immobilisation du soufre sous un colza est plus lente que sous une orge.

Les acides organiques aident à dissoudre les minéraux essentiels dont le phosphore et fer

Conclusion

Les bactéries et les champignons apportés agissent à leur tour comme engrais fertilisant ; ils peuvent dissoudre les phosphates enfermés dans le sol, les libérer et les racines peuvent ainsi absorber le phosphore rendu disponible. Ils peuvent aussi dissoudre d’autres minéraux rétrogradés provenant de la roche et les rendent disponibles.


La fixation de l’azote grâce à des bactéries est encore un des exemples de symbiotes des racines connus, car ils fournissent tous les besoins azotés aux légumineuses.

Le bio-contrôle

Les champignons Trichoderma agissent contre les attaques d’autres champignons, et participent ainsi à l'activation des défenses de la plante par l'amorçage des gènes de défense.
En plus des champignons et des bactéries, les protozoaires jouent un rôle actif dans la rhizosphère. Ils consomment des bactéries et contrôlent la surcroissance des populations bactériennes.
Certains nématodes minuscules sont également des prédateurs efficaces des bactéries.
La présence de protozoaires dans la rhizosphère peut augmenter la croissance des plantes.

La symbiose plante-microbienne est résumée dans le cycle symbiotique

Activer la biologie pour améliorer le fonctionnement du sol c’est :


En bref, l’activation biologique de certains groupes de micro-organismes vise à dynamiser l’ensemble du cycle symbiotique et à améliorer son fonctionnement ; Il s’agit donc d’adopter si possible des pratiques de préservation de l’équilibre des sols.

Les différentes catégories vivantes ont diverses fonctions, qui assurent le bon fonctionnement de l’ensemble.

Production de substances de croissance

Au cours de leur longue cohabitation avec les plantes les champignons mycorhiziens et les autres micro-organismes de la rhizosphère ont acquis la capacité de produire les mêmes substances ou des molécules analogues dotées des mêmes propriétés physiologiques, avec comme effet de favoriser la prolifération des racines qu'ils peuvent coloniser.

Les bactéries sont capables de produire et relâcher dans le sol des petites molécules organiques analogues aux hormones végétales produites par les plantes et leur permettant de réguler leur croissance. Ces molécules d’origine bactérienne peuvent être absorbées par les racines et permettent ainsi aux bactéries de manipuler la croissance des cultures.

Les extrémités des racines en croissance sont le siège de la production d'hormones végétales qui assurent la régulation du développement et de la croissance des différents organes de la plante ou de l’arbre.

L'ensemble des micro-organismes associés aux racines contribue donc à l'équilibre hormonal des cultures et influe sur son développement (croissance racinaire, date de débourrement, floraison, persistance des feuilles...).

Autres fonctions

Les champignons transportent des quantités importantes d’eau et de substances, participent à la dégradation des résidus de récolte et à sa transformation en humus.

Quant à la faune du sol, son rôle fondamental réside dans la transformation de la matière organique et dans son action mécanique sur les sols : formation de galeries, porosité, structuration des agrégats.

La contribution des invertébrés du sol est multiple : incorporation des résidus au sol, protection des plantes contre certains bio-agresseurs, activation sélective de l’activité microbienne, création de structure favorable à la vie du sol (incubateurs de microorganismes).

Les Techniques Culturales Simplifiées ou TCS

Certaines pratiques culturales ont un effet positif sur le développement des communautés d’invertébrés dans le sol, c’est le cas des Techniques Culturales Simplifiées ou sans labour. Par rapport à la technique conventionnelle du labour, ces techniques permettent d’augmenter les densités de vers de terre en général et de favoriser le développement des espèces fouisseuses du type lombricien.

Les vers de terre augmentent la présence de certains groupes microbiens du sol et semblent dans certains cas favoriser des bactéries qui produisent des hormones végétales qui à leur tour améliorent la croissance des plantes. Ces interactions biologiques procurent au sol une propriété d’auto-structuration, qui s’exprime à différentes échelles, allant des films microbiens jusqu’aux macro-galeries des vers de terre.

Les apports d’amendements organiques ou calciques

Ces produits ou un simple rééquilibrage du statut calcique et alcalin donnent des résultats prouvés parfois spectaculaires.

Activer biologiquement un sol fait appel à la notion de sol vivant où la rhizosphère constitue la zone d’influence de la racine sur le sol. Ces produits sont composés de minéraux dont les formes et les concentrations favorisent le développement de l’activité biologique du sol jusqu’à engendrer une augmentation de la biomasse et de la biodiversité microbienne ainsi qu'un accroissement de la faune du sol notamment des vers de terre. Les effets positifs de ces produits sont mesurables sur la vie du sol et sur la fertilité au bénéfice des cultures.

Le système immunitaire de la plante renforcé

Enfin, un environnement sain bien pourvu d'une population diversifiée de microbes devient préjudiciable aux agents pathogènes (champignons ou bactéries se développant sur les racines) d’où une protection contre les maladies racinaires (pourridié, fusariose, du phytophtora, du pythium ….).

Beaucoup de bactéries et de champignons symbiotiques ont développé des mécanismes variés pour contrer les champignons pathogènes: Barrière physique constitué par le manteau des ecto-mycorhizes, appauvrissement de la rhizosphère en fer ou des substances toxiques (antibiotiques).

En résumé, l’effet du sol et de ces organismes sur les plantes ne se réduit pas à la fourniture d’un support physique, d’une réserve d’eau et de nutriments minéraux. Cet effet met en jeu de nombreux mécanismes complexes que l’on commence juste à comprendre, et qui conduisent à une régulation fine de la croissance des plantes.

Les substances bioactives formées déploient leur action et font que les micro-organismes nocifs ou saprophytes ne peuvent plus se propager ; les micro-organismes utiles, leur font concurrence (en particulier pour la nourriture) et les supplantent en compliquant la colonisation de la rhizosphère.

Le système de recyclage des résidus

Les déchets végétaux ou les cadavres animaux subissent une protéolyse qui conduit à la fabrication d'ammoniaque. Cette ammonification se fait avec le concours de divers microorganismes des sols et des eaux : bactéries aérobies (Bactéries Pseudomonas), bactéries anaérobies strictes ou facultatives, moisissures, etc.

LE CYCLE DE L’AZOTE


L'exsudation dépend, entre autres, de l'activité photosynthétique des plantes et de la translocation des photosynthétats des organes aériens vers les racines. C'est pourquoi les facteurs climatiques tels que la lumière ou la température, qui régissent ces deux derniers processus, commandent également l'exsudation et, par cet intermédiaire, la densité et l'activité microbiennes au niveau des racines. En ce qui concerne l'atmosphère du sol rhizosphérique, elle est, en général, plus pauvre en O2 et plus riche en CO2 que celle du sol.

Beaucoup mieux que les racines, les champignons symbiotiques (surtout les ecto-mycorhizes) ainsi que les bactéries de la rhizosphère, disposent de toute une gamme de mécanismes qui leur permettent de solubiliser et de rendre absorbables ces ressources d'accès difficile: Altération des minéraux, extraction de l'azote et du phosphore contenu dans les matières organiques, solubilisation et transport du fer.

Grâce à son partenaire fongique, la plante reçoit des micronutriments tels que le soufre, le cuivre et le zinc, le potassium, le phosphore et l’azote.
 
Exemple des mycorhizes : Les filaments mycorhiziens se révèlent être de véritables pompes à phosphate, molécule solidement fixée sur les argiles du sol et que les racines ont bien du mal à récolter et à s'approprier.

Solubilisation du fer
Le fer est un élément essentiel dans la respiration et la photosynthèse, mais reste dans des formes insolubles dans le sol.
Certains champignons associés à des bactéries spécialisées de la rhizosphère solubilisent le fer et le rendent disponible pour les racines.

 
Minéralisation activée

Constats relatifs à la pratique d’une forme d’agriculture non symbiotique :

1) Une tendance à la diminution du contenu en matière organique des sols agricoles

2) L’érosion des sols

3) La diminution de la densité et de la diversité de certains organismes du sol suite à l’utilisation des pesticides et à la diminution de la teneur en matière organique.

4) l’arrêt de certaines cultures comme le pois dû aux chutes de rendements liés à un parasite du sol.

De ce point de vue, nous débutons à peine dans les découvertes promises sur les nombreuses interactions existantes entre plantes et leurs micro-organismes hôtes.
La complexité de l’ensemble des interactions entre plantes et d'autres formes de vie, surtout avec des champignons, seront à exploiter; mieux profiter des mécanismes de régulation entre le souterrain et à l’aérien, préserver et développer les symbioses de la plante avec son milieu pourront préserver l’agriculture des menaces de dégradation qui pointent.


Autre exemples de symbiose :



> Intérêt de fertilisation microbienne :

L’installation dans le sol d’une flore microbienne diversifiée à dominante aérobie permet à la plante de se nourrir de façon autonome en construisant sa rhizosphère, soit un environnement microbien du milieu racinaire digérant les éléments nutritifs naturellement présents dans le sol.

> Travail du sol et bonnes pratiques agricoles :

Laisser le sol nu le moins longtemps possible et maintenir son aération par la pratique des engrais verts et de façons culturales respectueuses (les labours profonds enfouissent les bactéries aérobies trop en profondeur, tandis que les anaérobies survivront difficilement au-dessus).

Dans ce cadre, la prise en compte du fonctionnement du sol et de ses acteurs pourrait participer à la transition vers une agriculture plus durable.


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